Crédits photo : DON EMMERT/AFP
C'est un retour au pratiques des premières heures du Web.
Le magazine américain Wired avait signé l'arrêt de mort du Web dès septembre 2010. «The Web is dead», avait titré la bible high-tech en une. Provocante, l'assertion visait à signaler la fin de l'exploration du Net par un navigateur (Firefox, Safari, Internet Explorer…) au profit d'une consommation de contenus numériques par les applications mobiles, depuis un smartphone ou une tablette multimédia.
Aux États-Unis, la consultation d'applications mobiles l'emporte déjà très largement (67%) sur l'accès à des sites mobiles (33%) dans le cœur des utilisateurs de smartphones Android, a révélé une étude publiée vendredi par l'institut Nielsen. Les applications dominent tous les autres usages du smartphone, représentant 56% de l'activité sur un terminal mobile, contre 19% pour les courriels, 15% pour les appels téléphoniques et… 9% consacrés au navigateur Web.
Cette évolution est lourde de conséquences pour les éditeurs de contenus. Ces derniers deviennent en effet dépendants des conditions imposées par les gardiens de ces écosystèmes intégrés, définissant les règles, du terminal à la plate-forme de téléchargement en passant par le système d'exploitation.
Apple, avec son iOS et ses terminaux iPad ou iPhone, en est l'incarnation la plus évidente. La firme à la pomme a fait le choix d'abandonner le format Flash au profit du HTML5 - rendant illisibles nombre d'animations et vidéos sur Internet - et impose ses conditions de rémunération (30%) aux éditeurs de contenus qui vendent applications ou abonnements depuis sa plate-forme.
La «surf neutralité»
Google, avec Motorola, a désormais les moyens de reproduire ce modèle d'intégration verticale. Il rappelle les «walled garden» (jardins clos) érigés dans les premières heures du Web par des sociétés comme AOL et CompuServe. Ces fournisseurs d'accès proposaient à leurs abonnés une sélection de contenus proposés pardes partenaires, avant de faire peu à peu tomber les barrières et de s'ouvrir largement au Web mondial.
Le retour de cette logique fermée pourrait pousser les régulateurs à s'interroger sur certaines pratiques. Il arrive ainsi qu'un mobinaute qui cherche à consulter un site Web sur l'iPad, en passant par le navigateur Safari, s'en voie interdire l'accès et soit renvoyé automatiquement vers l'application mobile du site en question sur l'App Store. Des pratiques qui semblent entraver la liberté de surfer. La «surf neutralité» pourrait ainsi être la nouvelle frontière à défendre après la «Search neutralité» et la Net neutralité.
Par Marie-Catherine Beuth
Journaliste, Le Figaro
Publié le 19/08/2011 à 22:34
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