vendredi 5 juillet 2013

Pour financer les partis en toute transparence, il existe un moyen : les "chèques démocratiques"

La décision du Conseil constitutionnel d'invalider les comptes de campagne 2012 de Nicolas Sarkozy met l'UMP dans une situation financière délicate. Le parti veut lancer une souscription nationale, relançant la question du difficile financement de la vie politique en France. 

La décision du Conseil constitutionnel de rejeter les comptes de campagne de l'UMP met en lumière la situation problématique du financement de la vie politique en France. Situation problématique en France, mais aussi dans les autres démocraties, car elle met en jeu des principes difficiles à concilier. 

Tout d'abord, l'activité politique - les campagnes, l'animation d'un parti - coûte de l'argent, et les partis politiques doivent bien se financer. 

Il existe un consensus pour penser qu'il faut limiter l'influence des “plus gros”, c'est-à-dire, pour résumer, les riches et les grandes entreprises, dans la politique, influence qu'ils peuvent obtenir grâce aux “dons” nécessaires pour financer la vie politique. 

Cela étant dit, il y a un autre droit fondamental en jeu, qui est celui de la libre expression : chacun peut avoir le droit d'exprimer son soutien à un parti ou à un mouvement politique. Et l'argent est une forme d'expression : des sociétés comme Médiapart, Le Monde ou Atlantico dépensent de l'argent pour exprimer des points de vue, ce qui est un droit fondamental. 

Il y a donc là un équilibre à mettre en place, toujours difficile. Un système trop restrictif peut avoir l'effet inverse de celui attendu, en poussant des hommes politiques à accepter de l'argent “sous la table” pour financer leurs campagnes. On sait le rôle que l'argent joue dans les campagnes électorales aux Etats-Unis. En Grande-Bretagne, la classe politique a été secouée par le scandale “cash for peerages”, où le Parti travailliste au pouvoir a “vendu” des honneurs symboliques à des personnalités contre des grosses donations au parti. 

Un des universitaires les plus engagés dans le “nettoyage” de l'influence de l'argent dans la vie publique est Lawrence Lessig, professeur de droit à Stanford, et il propose une solution, dénommée “democracy vouchers,” qu'on pourrait traduire par “chèque-démocratie.” 

L'idée est toute simple : chaque électeur reçoit un “chèque” de 50 dollars (considéré comme la somme minimum d'impôt payée par chaque citoyen), financé par l'Etat, qu'il peut attribuer au candidat qu'il désire. En échange, le candidat ne peut accepter aucune autre forme de financement. Si le citoyen ne verse pas son chèque à un candidat, celui-ci est versé au parti auquel il appartient ou, s'il n'appartient à aucun parti, à une caisse centrale de financement des campagnes. 

Dans ses détails, le système devrait être adapté à la France. Le système de Lessig ne s'applique qu'aux élections fédérales, car les élections au niveau des états fonctionnent avec des systèmes différents, contrairement à la France : il faudrait peut être un chèque par “niveau” d'élection pour nous. Aux Etats-Unis, il y a beaucoup plus d'inscrits aux partis politiques, car l'inscription est gratuite et faite au moment de l'inscription aux listes électorales. 

Mais le principe est bon : il permet un vrai financement transparent de la vie politique, et ce de manière décentralisée et déconnectée de divers lobbies. Avec la mise en place de vrais groupes de réflexion, il semble que cette idée pourrait vivifier la vie politique en France.

Publié le 5 juillet 2013

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