Comme nous l’avons vu dans le précédent bulletin, la réalité concurrentielle de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR) internationale nous pousse à ne pas fermer les yeux devant de telles problématiques. Le but de cet article est de présenter les différents classements internationaux, leur méthodologie et d’en saisir les principaux enjeux.
L’Academic Ranking of World University (ARWU ou classement de Shanghai), le Times Higher Education World University Ranking sont les deux principaux classements internationaux.
Les Classements Times Higher Education
Méthodologie
Le classement publié par le magazine britannique Times Higher Education en partenariat avec Thomson Reuters est particulièrement intéressant. Il est fondé autour de treize indicateurs regroupés en cinq grands groupes répartis comme suit :
- 32,5% de la note de l’université est basée sur les citations
- 30% sur sa performance en terme de recherche
- 30% sur la qualité des enseignements
- 5% pour l’internationalisation du corps étudiant
- 2,5% pour les liens entre l’université et l’industrie/secteur privé.
Il est possible d’obtenir un classement par filière (dont la filière Sciences Sociales).
A coté du classement World University Ranking le magazine publie un second classement basé uniquement sur la réputation des universités. La méthodologie est simple. 16 500 universitaires ont eu à répondre à la question suivante : vers quelle université orienteriez-vous vos meilleurs étudiants de premier cycle pour poursuivre un deuxième ou troisième cycle universitaire ?
Le World Reputation Ranking est un outil unique pour connaître l’opinion du monde universitaire sur les autres institutions internationales.
Constats et limites
Le classement World University Ranking est un outil de qualité de part la richesse des critères de classement. Il présente cependant un certain nombre de limites. Le critère du nombre de citations par article, basé sur la Thomson Reuters’ Web of Science database, délaisse dans le classement global les filières sciences humaines et sociales et favorise les publications anglo-saxonnes. La catégorie prenant en considération les liens avec l’industrie évalue le poids du financement privé dans les universités. Cet indicateur a pour effet de marginaliser les formations universitaires axées sur les sciences humaines au profit des sciences pures où le financement privé est plus répandu[1].
Le classement Jiao Tong de Shanghai (Academic Ranking of World Universities)
Méthodologie
Le classement de Shanghai repose sur 4 critères :
- la qualité de l’éducation basée sur le nombre de médaillés Fields ou de prix Nobel dans le corps enseignant (10%)
- La qualité des facultés selon les prix universitaires remportés par ses professeurs et le nombre de citations (40%)
- La production scientifique (40%). Pour les disciplines de Sciences Sociales la production se jauge au regard du nombre d’articles du Science Citation Index-Expended et du Social Science Indexation Index.
- La performance per capita (10%) : elle est mesurée en divisant les scores des 3 précédentes catégories par le nombre total d’employés universitaires à temps plein (10 %).
Classement de Shanghai en 2010 |
Constats et limites
Le classement de Shanghai rencontre un fort écho médiatique. Lancé en 2003, il fut le premier classement à proposer une comparaison internationale fondée sur des critères facilement quantifiables dans un contexte de prise de conscience forte de l’environnement concurrentiel de l’Enseignement Supérieur International (cf Bulletin de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Internationale n°4). Le classement ARWU est considéré comme désavantageant les recherches non anglophones. La clarté de la méthodologie a de son coté une contrepartie naturelle qui pousse le public et les médias à relayer un classement basé une vision simpliste des missions d’une université. Par exemple, le critère de qualité de l’éducation basé sur le nombre de médailles Fields ou prix Nobel enseignants au sein d’une université ne reflète pas la réalité de la pédagogie d’une institution.
Vers un nouveau classement Européen : les attentes autour du U-Multitank.
Les universités anglo-saxonnes sortent généralement en tête des deux précédents classements. Or, il est admis que les classements répondent à une volonté politique de définition des normes mondiales en terme d’Enseignement Supérieur et de Recherche[2]. En Europe, des organisations comme l’European University Association ont émis des réserves quant aux méthodologies des principaux classements existants. La Commission Européenne a décidé de financer la constitution d’un nouveau classement européen appelé U-Multirankchargé de relayer dans le reste du monde une vision européenne de l’excellence universitaire. Le nouveau classement permettra aux universités européennes de remonter dans le classement. Celui-ci sera multidimensionnel pour prendre en considération tout ce qui constitue les missions et rôles d’un établissement d’Enseignement Supérieur. L’évaluation d’un établissement suivra les critères présentés dans le schéma présenté ci dessous. Le classement connaît des retards dans sa sortie et nous attendons ses premières retombées. U-Multirank parviendra-t-il à porter une vision européenne de l’Enseignement Supérieur capable de valoriser ses institutions et d’y attirer un nombre croissant d’étudiants étrangers ?
Source : European Commission- Education and Culture DG « U Multirank Design and Testing the Feasibility of a Multidimensional Global University Ranking final report » Bruxelles Juin 2011 |
Conclusion :
Les classements internationaux des universités sont imparfaits méthodologiquement. Cela conduit le public à avoir une vision tronquée de ce qui constitue un établissement d’Enseignement Supérieur de qualité. Les universités peuvent avoir tendance à délaisser certains critères non évalués dans les classements. Les classements confirment la dimension compétitive de l’Enseignement Supérieur international. Les universités tendent à se conformer aux modèles considérés comme performants au regard des classements, principalement pour attirer le plus grand nombre d’étudiants étrangers. Il n’en demeure pas moins essentiel de se pencher sur cette problématique. Des étudiants étrangers, à l’importance du troisième cycle en passant par l’évaluation de la pédagogie, il apparaît que la question du classement des universités est transversale et touche un grand nombre de sujets de fonds essentiels dans la réflexion de l’ARES.
août 22nd, 2013 Terry Burte
BULLETIN DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE INTERNATIONAL – AOÛT 2013
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