http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/70056.htm
Comment une région peut-elle devenir un pôle entrepreneurial influent ? Voilà une question que de nombreux pays, désireux de dynamiser leur économie et de mettre en valeur leur savoir-faire technique, se posent. Si plus d'un économiste s'intéresse à ce sujet, certains acteurs de l'innovation et de la création d'entreprises apportent un point de vue éclairé, grâce à leur expérience du phénomène.
Le Professeur William Miller est l'un de ceux-là. Après des études en physique à Purdue University (Indiana), il quitte l'Argonne National Laboratory en 1965 pour rejoindre Stanford, où il devient le dernier professeur recruté par Frederick Terman, considéré par beaucoup comme le père de la Silicon Valley. Il y mène des recherches en physique et informatique, puis sera tour à tour professeur d'informatique, directeur du département, vice-président pour la recherche et doyen de l'université.
Mais sa carrière ne s'est pas limitée au milieu académique. En 1968, il se consacre aussi au capital-risque en participant, en tant que conseiller, à la création du Mayfield Fund [1], aujourd'hui l'un des fonds les plus influents de la Silicon Valley (il a donné lieu à une centaine d'entrées en bourse et autant d'acquisitions), qui investit aux Etats-Unis mais aussi en Inde et en Chine. Entre 1979 et 1990, il préside le SRI Internation al [2] (anciennement Stanford Research Institute), un organisme de recherche devenu indépendant de l'université de Stanford en 1970, qui réalise du développement et de la recherche techniques à la demande d'entités gouvernementales, d'organisations ou d'entreprises privées. Il a également siégé au conseil d'administration de grandes entreprises comme Signetics, Firemans Fund Insurance, la First Interstate Bank, la Wells Fargo Bank, la Pacific Gas and Electric Company, Varian Associates, WhoWhere? et Borland Software Corp. Lui-même créateur d'entreprises, William Miller a fondé ou participé à la fondation d'autres entreprises comme SmartValley, CommerceNet, le Center for Excellence in Non-profits ou encore Nanostellar.
Comment une région peut-elle devenir un pôle entrepreneurial influent ? Voilà une question que de nombreux pays, désireux de dynamiser leur économie et de mettre en valeur leur savoir-faire technique, se posent. Si plus d'un économiste s'intéresse à ce sujet, certains acteurs de l'innovation et de la création d'entreprises apportent un point de vue éclairé, grâce à leur expérience du phénomène.
Le Professeur William Miller est l'un de ceux-là. Après des études en physique à Purdue University (Indiana), il quitte l'Argonne National Laboratory en 1965 pour rejoindre Stanford, où il devient le dernier professeur recruté par Frederick Terman, considéré par beaucoup comme le père de la Silicon Valley. Il y mène des recherches en physique et informatique, puis sera tour à tour professeur d'informatique, directeur du département, vice-président pour la recherche et doyen de l'université.
Mais sa carrière ne s'est pas limitée au milieu académique. En 1968, il se consacre aussi au capital-risque en participant, en tant que conseiller, à la création du Mayfield Fund [1], aujourd'hui l'un des fonds les plus influents de la Silicon Valley (il a donné lieu à une centaine d'entrées en bourse et autant d'acquisitions), qui investit aux Etats-Unis mais aussi en Inde et en Chine. Entre 1979 et 1990, il préside le SRI Internation al [2] (anciennement Stanford Research Institute), un organisme de recherche devenu indépendant de l'université de Stanford en 1970, qui réalise du développement et de la recherche techniques à la demande d'entités gouvernementales, d'organisations ou d'entreprises privées. Il a également siégé au conseil d'administration de grandes entreprises comme Signetics, Firemans Fund Insurance, la First Interstate Bank, la Wells Fargo Bank, la Pacific Gas and Electric Company, Varian Associates, WhoWhere? et Borland Software Corp. Lui-même créateur d'entreprises, William Miller a fondé ou participé à la fondation d'autres entreprises comme SmartValley, CommerceNet, le Center for Excellence in Non-profits ou encore Nanostellar.
Aujourd'hui, outre ses nombreuses distinctions dans plusieurs grandes universités des Etats-Unis et d'Asie, William Miller est rattaché à la Graduate School of Business de Stanford, plus précisément au sein du Stanford Program on Regions of Innovation and Entrepreneurship [3] (SPRIE), où il apporte l'expérience de toutes ces années passées dans le coeur réactif de la Silicon Valley. Ses travaux portent essentiellement sur la région Asie. La collaboration entre le SPRIE et des experts internationaux de l'innovation a donné lieu en 2006 à la parution du livre Making IT: The Rise of Asia in High-Tech [4], qui décrit la percée successive du Japon (qui a su prendre très tôt des mesures destinées à encourager la création de start-up), de Taiwan, Singapour, de la Corée du Sud et plus récemment de l'Inde et de la Chine, dans le domaine des technologies de l'information.
Aujourd'hui, une autre région se distingue en matière d'entrepreneuriat : Israël, qui dispose d'une formation de grande qualité, et où de très nombreuses entreprises sont créées, malgré la situation politique très instable du pays. Devant la taille réduite du marché intérieur et l'hostilité des pays voisins, nombre de ces start-up se tournent très tôt vers l'international et partent aux Etats-Unis pour finir leur maturation et prendre de l'importance (sur ce thème, voir l'ouvrage Start-up Nation: The Story of Israel's Economic Miracle par Dan Senor et Saul Singer).
Son immense connaissance du fonctionnement de la Silicon Valley lui confère un regard acéré sur d'autres régions du monde qui ont une vocation entrepreneuriale. Pour lui, il n'est jamais trop ambitieux d'établir des comparaisons avec la réussite californienne, puisque "comme en sport, on ne peut devenir un champion du monde sans se mesurer à d'autres champions du monde". Pour devenir un pôle compétitif, deux éléments sont nécessaires : "les graines" (des chercheurs, des ingénieurs de qualité) et "le sol" (l'environnement, les structures et l'état d'esprit), qui permettra aux graines de germer.
De nombreuses régions disposent déjà des bonnes graines, mais peinent à rendre leur sol fertile. Un point primordial pour William Miller est de permettre une grande mobilité du capital et de la main d'oeuvre, afin de fluidifier les processus et d'encourager le "collective learning". En effet, les entrepreneurs immigrés ont une importance capitale, puisqu'ils tireront profit de ce que chaque région visitée offre de meilleur, tout en gardant une attache permanente à leur pays d'origine.
Son travail au SPRIE lui permet de mieux comprendre les tendances de la Silicon Valley, ce qui perdure et ce qui a changé au cours de sa récente histoire. La particularité des entrepreneurs y est avant tout d'entretenir un désir de créer de grandes entreprises, qui ont pour vocation rien de moins que de changer le monde. Par ailleurs, toute la subtilité de la réussite d'une start-up réside dans le passage entre les aspects techniques et "business".
Mais le professeur Miller ne perçoit pas cette motivation économique comme une fin purement lucrative. Il ne s'agit pas uniquement de faire de l'argent, mais avant tout de valoriser au mieux la recherche et l'excellence technologique. Dans le cadre de l'université de Stanford, c'est le rôle de l'Office of Technology Licensing, qui encadre le dépôt de brevets issus de la recherche de ses laboratoires. Les revenus engendrés, qui reviennent directement aux inventeurs et à leur département, ne représentent finalement qu'une faible partie (65 millions de dollars) du budget de Stanford voué à la recherche et au développement (un milliard) [5].
Une université qui produit des entrepreneurs
Près d'un demi-siècle après son arrivée à Stanford, William Miller commence à bien connaitre l'université. L'esprit tout particulièrement tourné vers l'entrepreneuriat qu'il y règne date de sa création en 1885 (la première promotion d'ingénieur y a été accueillie en 1891, après quelques années de planification et de travaux). La Californie avait alors encore des allures de "Wild West", et les premiers acteurs de l'université étaient de véritables pionniers, désireux d'enseigner des compétences très pratiques, dans le but de développer la région encore dénuée d'industrie. C'est grâce à cet état d'esprit qu'a été fondée la Federal Telegraph Corporation en 1909 à Palo Alto par Cyril Elwell, un ancien élève de Stanford, et dont l'investissement initial avait été fourni par David Starr , le premier président de l'université, qui deviendra ainsi le premier Angel Investor de la Silicon Valley. La technologie de base - l'émetteur à arc - avait été inventée par un ingénieur danois mais restait inutilisée en Europe. En rachetant les droits américains sur cet instrument, Elwell a pu développer la radiotélégraphie aux Etats-Unis, qui sera ensuite adoptée par l'US Navy. Dès la première génération de "pionniers", les bases de la création d'entreprise étaient donc déjà en place dans ce qui allait devenir la Silicon Valley : l'ingénieur aux compétences très pratiques, et l'investisseur doté d'une vision commerciale globale.
Aujourd'hui, d'après William Miller, Stanford ne pousse pas directement ses étudiants vers la voie de l'entrepreneuriat, mais serait uniquement vouée à fournir les outils pratiques et les qualités nécessaires à la réussite de ses étudiants, quelle que soit la voie qu'ils désirent emprunter. La fièvre entrepreneuriale qui règne dans la Silicon Valley et à Stanford serait simplement due à l'environnement local, caractérisé par une communauté active et liée par d'étroits réseaux, une grande communication entre industrie et recherche académique, et enfin d'importants moyens de facilitation sur le plan administratif. A cela s'ajoute évidemment un état d'esprit très créatif, ainsi qu'un rapport particulier et flegmatique à la prise de risque.
Tous ces éléments sont nécessaires, et leur association fait toute la particularité de Stanford et de la Silicon Valley, qui a vu le jour grâce à l'université elle-même. C'est cette différence culturelle qui d'après William Miller explique les difficultés que Stanford éprouve parfois dans sa collaboration avec d'autres régions : citons par exemple le retrait du projet "Stanford NYC" [6] de campus à New York en décembre 2011. Projet avorté sur lequel il ne s'agit pas de s'apitoyer car à 86 ans, William Miller est plus que jamais tourné vers l'avenir.
Eléments présents dans la Silicon Valley, nécessaires à l'entrepreneuriat
Crédits : MST
Aujourd'hui, une autre région se distingue en matière d'entrepreneuriat : Israël, qui dispose d'une formation de grande qualité, et où de très nombreuses entreprises sont créées, malgré la situation politique très instable du pays. Devant la taille réduite du marché intérieur et l'hostilité des pays voisins, nombre de ces start-up se tournent très tôt vers l'international et partent aux Etats-Unis pour finir leur maturation et prendre de l'importance (sur ce thème, voir l'ouvrage Start-up Nation: The Story of Israel's Economic Miracle par Dan Senor et Saul Singer).
Son immense connaissance du fonctionnement de la Silicon Valley lui confère un regard acéré sur d'autres régions du monde qui ont une vocation entrepreneuriale. Pour lui, il n'est jamais trop ambitieux d'établir des comparaisons avec la réussite californienne, puisque "comme en sport, on ne peut devenir un champion du monde sans se mesurer à d'autres champions du monde". Pour devenir un pôle compétitif, deux éléments sont nécessaires : "les graines" (des chercheurs, des ingénieurs de qualité) et "le sol" (l'environnement, les structures et l'état d'esprit), qui permettra aux graines de germer.
De nombreuses régions disposent déjà des bonnes graines, mais peinent à rendre leur sol fertile. Un point primordial pour William Miller est de permettre une grande mobilité du capital et de la main d'oeuvre, afin de fluidifier les processus et d'encourager le "collective learning". En effet, les entrepreneurs immigrés ont une importance capitale, puisqu'ils tireront profit de ce que chaque région visitée offre de meilleur, tout en gardant une attache permanente à leur pays d'origine.
Son travail au SPRIE lui permet de mieux comprendre les tendances de la Silicon Valley, ce qui perdure et ce qui a changé au cours de sa récente histoire. La particularité des entrepreneurs y est avant tout d'entretenir un désir de créer de grandes entreprises, qui ont pour vocation rien de moins que de changer le monde. Par ailleurs, toute la subtilité de la réussite d'une start-up réside dans le passage entre les aspects techniques et "business".
Mais le professeur Miller ne perçoit pas cette motivation économique comme une fin purement lucrative. Il ne s'agit pas uniquement de faire de l'argent, mais avant tout de valoriser au mieux la recherche et l'excellence technologique. Dans le cadre de l'université de Stanford, c'est le rôle de l'Office of Technology Licensing, qui encadre le dépôt de brevets issus de la recherche de ses laboratoires. Les revenus engendrés, qui reviennent directement aux inventeurs et à leur département, ne représentent finalement qu'une faible partie (65 millions de dollars) du budget de Stanford voué à la recherche et au développement (un milliard) [5].
Une université qui produit des entrepreneurs
Près d'un demi-siècle après son arrivée à Stanford, William Miller commence à bien connaitre l'université. L'esprit tout particulièrement tourné vers l'entrepreneuriat qu'il y règne date de sa création en 1885 (la première promotion d'ingénieur y a été accueillie en 1891, après quelques années de planification et de travaux). La Californie avait alors encore des allures de "Wild West", et les premiers acteurs de l'université étaient de véritables pionniers, désireux d'enseigner des compétences très pratiques, dans le but de développer la région encore dénuée d'industrie. C'est grâce à cet état d'esprit qu'a été fondée la Federal Telegraph Corporation en 1909 à Palo Alto par Cyril Elwell, un ancien élève de Stanford, et dont l'investissement initial avait été fourni par David Starr , le premier président de l'université, qui deviendra ainsi le premier Angel Investor de la Silicon Valley. La technologie de base - l'émetteur à arc - avait été inventée par un ingénieur danois mais restait inutilisée en Europe. En rachetant les droits américains sur cet instrument, Elwell a pu développer la radiotélégraphie aux Etats-Unis, qui sera ensuite adoptée par l'US Navy. Dès la première génération de "pionniers", les bases de la création d'entreprise étaient donc déjà en place dans ce qui allait devenir la Silicon Valley : l'ingénieur aux compétences très pratiques, et l'investisseur doté d'une vision commerciale globale.
Aujourd'hui, d'après William Miller, Stanford ne pousse pas directement ses étudiants vers la voie de l'entrepreneuriat, mais serait uniquement vouée à fournir les outils pratiques et les qualités nécessaires à la réussite de ses étudiants, quelle que soit la voie qu'ils désirent emprunter. La fièvre entrepreneuriale qui règne dans la Silicon Valley et à Stanford serait simplement due à l'environnement local, caractérisé par une communauté active et liée par d'étroits réseaux, une grande communication entre industrie et recherche académique, et enfin d'importants moyens de facilitation sur le plan administratif. A cela s'ajoute évidemment un état d'esprit très créatif, ainsi qu'un rapport particulier et flegmatique à la prise de risque.
Tous ces éléments sont nécessaires, et leur association fait toute la particularité de Stanford et de la Silicon Valley, qui a vu le jour grâce à l'université elle-même. C'est cette différence culturelle qui d'après William Miller explique les difficultés que Stanford éprouve parfois dans sa collaboration avec d'autres régions : citons par exemple le retrait du projet "Stanford NYC" [6] de campus à New York en décembre 2011. Projet avorté sur lequel il ne s'agit pas de s'apitoyer car à 86 ans, William Miller est plus que jamais tourné vers l'avenir.
Eléments présents dans la Silicon Valley, nécessaires à l'entrepreneuriat
Crédits : MST
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