Le premier sommet industrie et design, IDsummit, qui s’est tenue à Nante le 5 septembre, voulait consacrer le design comme un outil de reconquête industriel. Mais en faisant la part belle à la très séduisante " pensée design" , certains discours ont occulté la difficulté à faire évoluer les mentalités.
Grand moment de perplexité à la sortie de la conférence IDsummit 2013, qui s’est tenue à Nantes le 5 septembre. Présentée, sans modestie, comme les premières rencontres internationales de l’industrie et du design, cette manifestation, montée par deux agences de communication, n’avait rien d’internationale. Mais là n’est pas le problème. Et puis, l’intitulé est une façon d’afficher ses ambitions pour les - éventuelles - futures éditions. Que, prévue sur deux jours, la conférence ait été ramenée à un seul, n’était pas plus mal. Et qu’Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, qui devait en faire l’ouverture, ait fait faux bond, n’était pas forcément grave, non plus. Il n’aurait probablement rien dit de nouveau. Le plan design d’Alain Cadix, capitaine de la nouvelle équipe de France du design, ne sera dévoilé que le 15 octobre prochain, lors des prochains rendez-vous du design.
En revanche, au fil de la journée, c’est une étrange idée du design qui s’est doucement distillée. Certes, il y a urgence à réconcilier l’industrie française avec l’envie de faire des produits plus désirables, plus simples et surtout inspirés par l’usage plutôt que poussés par la technologie. Certes, le design a là un rôle essentiel à jouer. Mais cela ne peut se faire simplement. C’est toute une culture technophile qu’il faut faire évoluer.
Et ce n’est pas en cachant la complexité du design et la difficulté de calculer son retour sur investissement ou en proposant de débaptiser les designers comme certains intervenants le suggèrent - parce que le mot fait peur, voire est devenu tabou -, que cela fera avancer les mentalités.
Et présenter le design thinking (la pensée design) de l’agence californienne Ideo, aussi séduisant et efficace soit-il, comme la solution pour insuffler une culture design dans les écoles d’ingénieurs, de commerce et chez les élites politiques (la région Pays de Loire s’en est payé un séminaire), est une solution court-termiste, qui risque de décevoir.
Certes, comme le propose Bertrand Barré, directeur de Barré et associés, il faut bien sortir d’une pensée unique de l’innovation, d’une culture de l’étude de marché, pour innover en rupture. Certes, il faut de l’observation et de l’interdisciplinarité. Certes, le numérique est une chance à saisir, car il permet d’imaginer de nouveaux produits-services hybrides, plus proches des besoins, comme le rappelle Jean-Louis Frechin.
Mais non, l’accès à des fablab, ces ateliers de production numérique open source, ne peut pas transformer un bricoleur, un maker, voire un salarié d’entreprise ayant une idée… en designer.
Non, une plate-forme internet (comme la future e-indus de Bertrand Barré) ne peut pas transformer tous les inventeurs, les créateurs, en innovateurs et encore moins en designers.
Si un designer seul ne peut rien, ce dernier reste nécessaire pour mener à bien une démarche design, avec les bonnes personnes et de manière durable, comme l’a rappelé Anne-Marie Boutin, président de l’APCI, en conclusion de la journée. Elle n’est pas la seule à défendre cette discipline (voire indiscipline). Des designers professionnels travaillant avec des industriels, l’ont aussi expliqué, tout au long de la conférence. Mais, forcément, face au fastidieux travail de pédagogie que les designers doivent encore et toujours mener, l’idée qu’avec des post-it (le support privilégié du design thinking) on pourrait tous faire du design, est plus séduisante. Mais fausse.
Par Aurélie Barbaux - Publié le 06 septembre 2013, à 17h55
http://www.usinenouvelle.com/article/tous-designers.N204315#xtor=RSS-215
Grand moment de perplexité à la sortie de la conférence IDsummit 2013, qui s’est tenue à Nantes le 5 septembre. Présentée, sans modestie, comme les premières rencontres internationales de l’industrie et du design, cette manifestation, montée par deux agences de communication, n’avait rien d’internationale. Mais là n’est pas le problème. Et puis, l’intitulé est une façon d’afficher ses ambitions pour les - éventuelles - futures éditions. Que, prévue sur deux jours, la conférence ait été ramenée à un seul, n’était pas plus mal. Et qu’Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, qui devait en faire l’ouverture, ait fait faux bond, n’était pas forcément grave, non plus. Il n’aurait probablement rien dit de nouveau. Le plan design d’Alain Cadix, capitaine de la nouvelle équipe de France du design, ne sera dévoilé que le 15 octobre prochain, lors des prochains rendez-vous du design.
En revanche, au fil de la journée, c’est une étrange idée du design qui s’est doucement distillée. Certes, il y a urgence à réconcilier l’industrie française avec l’envie de faire des produits plus désirables, plus simples et surtout inspirés par l’usage plutôt que poussés par la technologie. Certes, le design a là un rôle essentiel à jouer. Mais cela ne peut se faire simplement. C’est toute une culture technophile qu’il faut faire évoluer.
Et ce n’est pas en cachant la complexité du design et la difficulté de calculer son retour sur investissement ou en proposant de débaptiser les designers comme certains intervenants le suggèrent - parce que le mot fait peur, voire est devenu tabou -, que cela fera avancer les mentalités.
Et présenter le design thinking (la pensée design) de l’agence californienne Ideo, aussi séduisant et efficace soit-il, comme la solution pour insuffler une culture design dans les écoles d’ingénieurs, de commerce et chez les élites politiques (la région Pays de Loire s’en est payé un séminaire), est une solution court-termiste, qui risque de décevoir.
Certes, comme le propose Bertrand Barré, directeur de Barré et associés, il faut bien sortir d’une pensée unique de l’innovation, d’une culture de l’étude de marché, pour innover en rupture. Certes, il faut de l’observation et de l’interdisciplinarité. Certes, le numérique est une chance à saisir, car il permet d’imaginer de nouveaux produits-services hybrides, plus proches des besoins, comme le rappelle Jean-Louis Frechin.
Mais non, l’accès à des fablab, ces ateliers de production numérique open source, ne peut pas transformer un bricoleur, un maker, voire un salarié d’entreprise ayant une idée… en designer.
Non, une plate-forme internet (comme la future e-indus de Bertrand Barré) ne peut pas transformer tous les inventeurs, les créateurs, en innovateurs et encore moins en designers.
Si un designer seul ne peut rien, ce dernier reste nécessaire pour mener à bien une démarche design, avec les bonnes personnes et de manière durable, comme l’a rappelé Anne-Marie Boutin, président de l’APCI, en conclusion de la journée. Elle n’est pas la seule à défendre cette discipline (voire indiscipline). Des designers professionnels travaillant avec des industriels, l’ont aussi expliqué, tout au long de la conférence. Mais, forcément, face au fastidieux travail de pédagogie que les designers doivent encore et toujours mener, l’idée qu’avec des post-it (le support privilégié du design thinking) on pourrait tous faire du design, est plus séduisante. Mais fausse.
Par Aurélie Barbaux - Publié le 06 septembre 2013, à 17h55
http://www.usinenouvelle.com/article/tous-designers.N204315#xtor=RSS-215
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