À 56 ans, Emmanuel Le Portz connaît les grandes entreprises comme sa poche. Actuellement consultant en entreprise auprès de grands groupes, il a débuté comme directeur commercial Europe chez Unilever avant de devenir directeur de division chez Rentokil Initial. Souhaitant en apprendre davantage sur le rapport des jeunes à l’entreprise, il a coécrit avec son fils Alexis Les Jeunes et l’Entreprise ...
Comment en êtes-vous venu à écrire ce livre ?
L'élément déclencheur, c'est quand j'ai vu Alexis travailler pour la première fois. J'ai été très étonné par le décalage entre sa manière de travailler – notamment dans son rapport aux nouvelles technologies avec l’utilisation de wikis ou de Skype – et celle de ma génération. Quand je lui ai fait part de ma stupéfaction, il m'a immédiatement répondu : « Je ne sais pas faire autrement. » Cela m'a désarçonné. En tant que consultant, j'avais vu des centaines d'entreprises fonctionner autrement ! Du coup, je me suis dit que j'avais raté quelque chose. J'ai alors eu envie de m'intéresser de plus près à la place qu'occupent les jeunes dans l'entreprise en y consacrant un livre, que j'ai souhaité écrire en collaboration avec mon fils afin de confronter nos deux points de vue.
Qu’est-ce que l'écriture de ce livre vous a permis de « découvrir » ?
En interrogeant des dirigeants d'entreprise, nous nous sommes aperçus qu'il y avait des incompréhensions entre ma génération et celle de mon fils. Que les mêmes préoccupations induisaient des comportements totalement différents selon que l'on soit jeune ou senior. Pour gagner en sécurité, il fallait à mon époque bâtir sa carrière sur le long terme, tandis que, pour la génération de mon fils, se faire un maximum d'argent le plus vite possible est désormais le meilleur moyen d’y parvenir. J'ai vécu dans un univers certain, lui évolue dans un univers incertain. On vit les choses de manière différente. Ce livre m'a permis de mieux comprendre la génération de mon fils.
En quoi l'époque où vous étiez jeune cadre est-elle différente de celle que connaissent les jeunes diplômés d'aujourd'hui ?
Le monde de l'entreprise a beaucoup évolué depuis mon entrée dans la vie active. Le rapport au temps, par exemple, n'est plus du tout le même. À mon époque, on bâtissait sur dix ans. Aujourd'hui, les jeunes ne savent pas où ils seront dans six mois. Internet a changé la donne : des sociétés peuvent devenir énormes en quatre ou cinq ans, puis disparaître dix ans plus tard. C'est un constat difficile pour ma génération : nous n'avons pas été éduqués à l'incertitude. J'étais dans une époque très rationnelle. Par ailleurs, les jeunes sont aujourd'hui beaucoup plus méfiants vis-à-vis de l'entreprise que leurs aînés, et à raison. Des pratiques telles que la rotation du personnel ou encore le suremploi des stagiaires n'existaient pas à mon époque. La mondialisation n'était pas encore passée par là.
Au sein des entreprises, que peuvent selon vous apporter les seniors aux jeunes générations et vice versa ?
L'expérience est clairement l'atout majeur des seniors. En contrepartie, les jeunes ont un savoir-faire avec les nouvelles technologies, une capacité à trouver efficacement des informations et à rester très pragmatiques qui font souvent défaut à leurs aînés. Ainsi, lorsque Alexis me pose une question, je suis en mesure de lui donner des conseils avisés grâce à l'expérience que j'ai acquise au cours de ma carrière. Nos deux générations ont besoin de se comprendre.
Est-ce, selon vous, aux entreprises de s'adapter aux jeunes générations ?
Oui, cela ne fait aucun doute. Aujourd'hui, les entreprises sont de plus en plus confrontées à l'imprévu, à l'éphémère, à l'aléatoire. Autant de choses auxquelles les jeunes sont bien mieux préparés que les seniors. S'adapter aux valeurs des jeunes est donc une question de survie pour l'entreprise. Elle doit connaître un bouleversement total.
educpros.fr
17/06/2011
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