jeudi 2 juin 2011

Vous avez interviewé Arnaud Muller, auteur de «Tunis et Paris: les liaisons dangereuses»

Savez-vous si la France soutient déjà des candidats parmi les nombreux candidats aux élections qui se profilent? Qui aurait-elle avantage à voir gagner?
Non, il n'y pas à notre connaissance de candidat soutenu par Paris. Il y a désormais une totale recomposition du paysage politique. Et il faudra aussi tenir compte du parti islamiste Enahda qui pourrait faire une percée lors des élections régionales. C'est ce qu'il convient d'observer à présent.

Pensez-vous que la France ait entaché durablement son image en Tunisie ou peut-elle s'en remettre?
J'en ai parlé plus bas. Effectivement, son image en a pâti mais je pense qu'elle peut s'en remettre. Il y a clairement un changement de ton aujourd'hui au quai d'Orsay.

Finalement ne pensez-vous pas que la réaction de la France après la déchéance de Ben Ali a encore été très timide?
La France a été extremement surprise par la rapidité de cette révolution effectivement et nos politiques sont restés très prudents.
...

Comment vont évoluer les relations diplomatiques avec la Tunisie? Est-ce que la France peut s'en sortir étant donné ses nombreux liens avec Ben Ali?
C'est une période très délicate effectivement, très instable toujours. Il est trop tôt pour se prononcer mais lors de nos séjours tunisiens - payés par nos frais -, nous avons senti une certaine défiance à l'égard des français. Les nouveaux dirigeants ont bien évidemment à coeur d'affirmer leur indépendance. Mais je pense que la France restera un partenaire privilégié de la Tunisie en raison des liens culturels, historiques qui existent réellement. Nous sommes très proches! Il faudra tout de même pour nos diplomates négocier avec des gens qui n'étaient pas considérés comme des interlocuteurs crédibles. Délicate mission.

Pourquoi la Tunisie est un eldorado pour les entreprises françaises? Cela aurait été plus compliqué de s'installer au Maroc ou en Algérie?La Tunisie était le pays le plus stable, le plus sur pour les investisseurs français. Les Français sont également présents au Maroc et en Algérie mais c'est plus compliqué.
...

Peugeot, Bricorama, qu'est-ce qui a fait que la Tunisie a été le partenaire économique privilégié des grands groupes français?
L'extraordinaire attractivité de ce pays : des terrains pas chers, des travailleurs très peu payés et très flexibles, des exonérations de charges importantes. Et puis ce lien avec l'ancienne puissance coloniale! A Tunis, la Peugeot fascine toujours! Enfin, la stabilité qu'offrait le régime de Ben Ali en matant toute opposition et toute contestation.
...

Les entreprises françaises sont-elles les seules à être associées à ce point au pouvoir tunisien? Ou y a t-il d'autres groupes internationaux qui ont dealé avec Ben Ali?
malik

D'autres pays ont bien évidemment commercé avec la Tunisie de Ben Ali. Les Suisses, les Italiens, les Allemands mais la France est sans doute le principal partenaire économique. A noter que Mc Donald et Pizza Hut, deux groupes américains, étaient sur le point d'ouvrir des restaurants en Tunisie mais ils ont fait marche arrière après quelques approches des proches de l'ancien président.

Les intérêts économiques français tels qu'ils ont été définis par le régime de Ben Ali vont-ils être conciliables avec le nouveau régime élu en juillet?
C'est la grande préoccupation du moment du côté des investisseurs français. Il y aura nécessairement une redistribution des cartes en matière économique aussi. Les avantages qu'offraient l'ancien régime aux sociétés étrangères qui venaient s'installer en Tunisie - exonérations de charge, peu d'impôt, salaires très bas - sont actuellement l'objet de débats. Le principal syndicat tunisien, l'UGTT, estime que les entreprises françaises ne se sont pas toujours bien comportées avec les ouvriers tunisiens.

...

M.B.

20minutes.fr
Créé le 31/05/2011 à 16h40 -- Mis à jour le 01/06/2011 à 14h59

Lire toute l'interview en cliquant sur le titre.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire