mardi 14 juin 2011

Comment réformer le baccalauréat

Je me suis intéressé à ce dossier publié dans l'édition d'aujourd'hui du journal La Croix. Je reprend de larges extraits qui méritent d'y réfléchir puisque nous disposons en Tunisie du même système.

Les extraits du dossier :

- À la fois monument national et rite de passage, le « bac » est souvent critiqué pour sa lourdeur, son coût, son côté couperet, voire la baisse prétendue de son niveau.

- Un rendez-vous qui mobilise des moyens humains et financiers impressionnants et conduit de nombreux établissements à stopper les cours de façon prématurée.

- Le gouvernement actuel {français] fait preuve d’une grande prudence pour réformer cet examen. Sa réforme du lycée, entrée en vigueur cette année pour la classe de seconde et effective en septembre pour les élèves de première, ne prévoit pas de remodeler ce diplôme, souvent décrié.

- De nouvelles épreuves seront créées en 2012 pour tenir compte de l’introduction de nouvelles matières comme « droit et grands enjeux du monde contemporain » ou « informatique et sciences du numérique ». De même, les élèves de la filière scientifique n’auront plus, à l’avenir, de cours d’histoire-géographie obligatoires en terminale et passeront donc leur examen dans cette matière avec un an d’avance.

- « Ceux qui voudraient la mort du bac ou des métamorphoses trop profondes ne mesurent pas les conséquences en chaîne que cela pourrait avoir », met en garde Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire.


Des experts de l’éducation ne sont pas cet avis et suggèrent des pistes de réforme au nombre de Cinq.
  • « Créer un diplôme de fin du secondaire », François Dubet, Professeur de sociologie à l’université Bordeaux II
- « Aujourd’hui, le taux de réussite au bac est supérieur à 80 %. Ce diplôme constitue quasiment un certificat de fin d’études secondaires. Et en même temps, il est un titre d’accès à l’enseignement supérieur, lequel s’avère en réalité sélectif : la moitié de ses étudiants, notamment ceux des BTS, IUT et classes “prépas”, font l’objet d’une sélection à l’entrée du premier cycle. Le bac est donc ce diplôme que tout le monde a.

- Mieux vaudrait le remplacer par un diplôme de fin d’études secondaires. Cela permettrait d’en finir avec le bachotage, qui est devenu la principale raison d’être du lycée. Les parcours seraient beaucoup plus ouverts en termes de choix de filières, de choix d’options. En outre, les universités assumeraient ouvertement leurs responsabilités en matière de sélection. »

  • « Un seul bac pour tous », Alain Bentolila, Linguiste

- « ... au lieu d’engager des réformes substantielles pour améliorer l’ensemble du système éducatif depuis la maternelle, elles se sont contentées de baisser le niveau d’exigence lors des épreuves et ont créé un rideau de fumée en multipliant les bacs et les options. Résultat : la sélection est d’autant plus cruelle qu’elle est différée, au niveau bac + 1 ou bac + 2.

- un baccalauréat unique pour tous, avec un nombre d’épreuves resserré qui permette de s’assurer que les candidats ont acquis une culture générale.

- faire marche arrière s’agissant du bac pro, qui fait souvent l’objet d’une orientation par défaut. [et l'appeler] “brevet professionnel”. »

  • « Un tirage au sort des épreuves à passer », Marie Duru-Bellat, Professeur de sociologie à Sciences-Po Paris

- « ... le bac offre un baromètre commun en soumettant à des épreuves identiques l’ensemble des candidats d’une même série.

- ... les enseignants soutiennent que, sans lui, les élèves ne seraient pas motivés par les apprentissages, voire décrocheraient.

- l’augmentation du nombre de candidats est telle qu’on se demande chaque année davantage si cela va passer ou casser, si les épreuves ne vont pas être remises en cause par des incidents. Un allègement s’impose.

- Pourquoi ne pas prévoir un système dans lequel les élèves se prépareraient à un examen final dans la plupart des matières, comme c’est le cas aujourd’hui, mais ne plancheraient effectivement que sur une petite partie d’entre elles, après tirage au sort ? Cela permettrait en tout cas de mobiliser moins de correcteurs et de concentrer les examens sur quelques jours seulement. »

  • « Augmenter la part de contrôle continu », Thierry Cadart, Secrétaire général du Sgen-CFDT

- « ... pour les élèves le véritable enjeu ne se situe pas au moment du baccalauréat mais dans les deux années qui le précèdent. En effet, dans la plupart des filières sélectives, les établissements se basent sur les dossiers qui leur sont adressés avant même que se déroulent les épreuves du bac.

-  vu la lourdeur et les sommes gigantesques consacrées à l’organisation de ces examens (NDLR : près de 0,1 % du budget de l’éducation nationale), [il serait préférable] de réduire à quatre ou cinq le nombre des épreuves du contrôle final.

- Un mélange de contrôle continu et de contrôle final aurait le mérite de mieux préparer les élèves au système d’évaluation qui les attend à l’université. Il permettrait aussi de valoriser la capacité à mener des recherches, à les présenter, à travailler en groupe. Des capacités qui, trop souvent, font défaut aux étudiants du supérieur. »

  • « Éviter que le bac ne marque une rupture », Frédéric Wacheux, Directeur du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Cereq)

- « Le bac possède une charge symbolique démesurée. Dans tous les esprits, il marque une rupture. Comme si la vie s’arrêtait le jour des premiers examens pour reprendre à la publication des résultats. Le problème, c’est que pour réussir scolairement, il faut s’intéresser à l’ensemble de la période qui va de bac -3 à bac +3.

- Un élève qui réussit un bac “réparation automobile” et qui, faute de pouvoir entrer en BTS, s’inscrit à la fac en philosophie, a toutes les chances d’échouer. Pour mieux coordonner l’avant et l’après-bac, pourquoi ne pas prévoir un ministère qui aurait en charge toutes les formations du début du lycée jusqu’au niveau licence, et deux autres, l’un pour le primaire et le collège, l’autre pour les masters et doctorats ? »

 
Le dossier s'est intéressé aussi aux "formules variées" pratiquées "d’un pays européen à l’autre" : « A-Level » au Royaume-Uni, « Abitur » en Allemagne, « Bachillerato » en Espagne, « Reifeprüfung » en Autriche…
 
Le constat est que "les formes d’évaluation varient considérablement en Europe".

Contrôle continu ou examen final, épreuves écrites ou orales, sésame ou non pour l’enseignement supérieur…

Les formules du « baccalauréat » européen sont multiples. « Malgré l’harmonisation des systèmes universitaires, le bac reste original et spécifique aux différents pays », observe Éric Charbonnier, expert à la direction de l’éducation de l’OCDE.

- En France comme en Irlande, il s’agit d’un examen unique.

- Les « bacs » espagnol et suédois sont au contraire entièrement basés sur le contrôle continu.


Mais la plupart des pays européens ont choisi de mixer les formules.

- En Allemagne, au Danemark et en Norvège, le « bac » tient ainsi compte des notes obtenues à des épreuves finales dans quelques matières, mais aussi de celles acquises dans toutes les matières au cours des deux dernières années de lycée.

- En Italie, l’examen d’État final est noté sur 100 points, dont 20 sont attribués au contrôle continu réalisé au cours des trois années de lycée. Les activités extrascolaires (sportives, culturelles ou humanitaires) des jeunes Italiens peuvent aussi entrer en ligne de compte.

- Avec dix épreuves en moyenne prévues pour l’examen final, la France est championne d’Europe.

- En Angleterre, les élèves n’en passent que trois, tandis que leurs camarades allemands en passent quatre ou cinq, selon les Länder.

- Elles peuvent être exclusivement écrites, comme en Grèce par exemple.

- Mais la plupart des pays européens prévoient des oraux.

- L’examen italien repose ainsi sur trois écrits (45 % de la note) et un entretien (35 % de la note) au cours duquel le candidat défend une « thèse » de son choix.

Souvent, le certificat de fin d’études secondaires ne permet pas à lui seul d’accéder à l’enseignement supérieur. La sélection est de rigueur à l’entrée des universités, que ce soit sur la base d’épreuves spécifiques comme en Finlande, ou selon les notes obtenues dans le secondaire. Les universités anglaises s’appuyent ainsi sur les résultats des trois matières passées au moins au A-Level pour recruter leurs étudiants.

« Dans ces pays, le bac ne correspond qu’à la fin du lycée. En France au contraire, il est considéré comme le premier diplôme de l’enseignement supérieur », note Éric Charbonnier. Ce rituel de passage n’est pourtant qu’une étape, mais d’importance : selon une étude de l’OCDE datée de 2010, le taux de chômage des 20-24 ans qui n’ont pas obtenu le bac atteint 21,5 % en France, contre 11,1 % en Allemagne.


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