La Corée du Sud est souvent montrée comme un modèle de développement économique, où éducation et emploi vont de pair. Pourtant malgré un taux de chômage très bas, les statistiques et la réalité nous montrent une réalité qui est tout autre.
La Corée du Sud est souvent citée comme l’exemple de réussite d’une économie du plein emploi en temps de crise financière généralisée. Les statistiques publiées régulièrement par le ministère du travail, et reprise par l’OCDE, viennent conforter l’idée qu’un système éducatif performant est la garantie d’une très bonne employabilité et donc d’un taux d’inactivité très faible. En effet avec un taux de chômage de 3,4% à la sortie de la crise qui laisse rêveur, l’image d’un marché du travail dynamique dans la quinzième économie mondiale est très forte.
La Corée du Sud est le pays de l’OCDE qui engage le plus de dépenses dans son système éducatif, et talonne l’Islande en dédiant à ce secteur, 7,6% de son PIB (dont 4,7% pour le secteur public). Comme l’accès aux meilleures écoles est l’assurance d’une future réussite professionnelle, les familles n’hésitent pas à consacrer 30% de leurs revenus (12% en 2006) pour financer à leurs rejetons, des cours particuliers et privés en fin de journée déjà très chargée. Cours du matin pour une préparation aux examens d’entrée à l’université, cours du soir pour s’avancer sur les programmes scolaires, les nuits séoulites s’égayent de mini-bus qui transportent enfants et adolescents à leurs cours privés.
Plus de jobs que de travail
Pourtant cet investissement important dans le système éducatif est loin d’être une garantie de trouver automatiquement l’emploi désiré, même si a priori le taux de chômage « officiel » peut le laisser penser : 35% de la population active ne cotisent pas à un système de chômage, soit parce que l’entreprise a moins de trois salariés, soit parce que le travail est un job (moins de 80 heures par mois). Sans couverture social, le job est de mise pour survivre et les jobs sont nombreux en Corée. On repère ces gisements de salariés low cost ainsi dans toute la société séoulite : des étudiants, main- d’œuvre corvéable à 4€ de l’heure, recrutés par les chaînes tels que Starbucks, Zoo Coffe ou Cafe Bean ; des retraités, profitant des transports gratuits, qui font office de livreurs pour la multitude de sites internet ; des femmes sous-payées qui représentent l’essentiel des employés de commerce et des supermarchés ouvert 24h/24h ; des cumulards d’emplois, à l’image de ces enseignants qui le soir s’improvisent conducteurs pour ramener les propriétaires de voitures éméchés après avoir passé une soirée entre collègues.
La population invisible des diplômes sans emploi
Si cette population précaire qui ne bénéficie pas de la couverture d’une assurance- chômage est clairement identifiée, il en est une autre en revanche qui échappe à toutes statistiques sur le chômage : les diplômés sans emploi. Plus du tiers des 25-64 ans sont déclarés sans activité, dont la majorité est diplômée. Les chiffres publiés par l’OCDE à la mi-septembre sont venus confirmer la situation de crise à laquelle doit faire face le gouvernement de Lee Myun-bak, car au sein de l’organisation internationale, la Corée du Sud est lanterne rouge, précédant tout juste la Turquie, avec un taux d’emploi de seulement 76% pour les diplômés du tertiaire (70% pour les 2e cycle du secondaire et post-secondaire non tertiaire). A titre de comparaison, la France se situe dans la moyenne de l’OCDE avec 84%, la Norvège se réservant la première place de ce classement avec 90%. Alors qu’au recrutement ils sont préférés par les grands groupes et les administrations, les jeunes diplômés sud-coréens mettent en moyenne 11 mois pour trouver un travail.
Petits boulots : diplômés contre non-qualifiés
Entre logique éducative poussée à l’extrême dans l’espoir de décrocher la « bonne situation », et souci d’offrir un service gratuit 24h/24h mais qui multiplie les emplois précaires, les responsables politiques ont bien des difficultés à trouver une solution à un marché de l’emploi complexe, où les mieux diplômés finissent par occuper des postes d’emploi non-qualifiés. Pour l’instant, on court au plus pressé : les 30 plus importantes entreprises de Séoul se sont ainsi engagées à multiplier les embauches, dont une moitié de diplômés pour le deuxième semestre 2011. Mais le gouvernement également insiste auprès des administrations pour qu’elles évitent une discrimination massive à l’embauche pour les non diplômés ; cela reste à ce jour un vœu pieux puisque en juillet dernier, les entreprises du secteur public ont « annoncé qu’elles auront du mal à les embaucher ».
Arnaud Vojinovic pour www.lesinfluences.fr
Mercredi 28 Septembre 2011
http://emploiparlonsnet.fr/les-directs/made-in-seoul
La Corée du Sud est souvent citée comme l’exemple de réussite d’une économie du plein emploi en temps de crise financière généralisée. Les statistiques publiées régulièrement par le ministère du travail, et reprise par l’OCDE, viennent conforter l’idée qu’un système éducatif performant est la garantie d’une très bonne employabilité et donc d’un taux d’inactivité très faible. En effet avec un taux de chômage de 3,4% à la sortie de la crise qui laisse rêveur, l’image d’un marché du travail dynamique dans la quinzième économie mondiale est très forte.
La Corée du Sud est le pays de l’OCDE qui engage le plus de dépenses dans son système éducatif, et talonne l’Islande en dédiant à ce secteur, 7,6% de son PIB (dont 4,7% pour le secteur public). Comme l’accès aux meilleures écoles est l’assurance d’une future réussite professionnelle, les familles n’hésitent pas à consacrer 30% de leurs revenus (12% en 2006) pour financer à leurs rejetons, des cours particuliers et privés en fin de journée déjà très chargée. Cours du matin pour une préparation aux examens d’entrée à l’université, cours du soir pour s’avancer sur les programmes scolaires, les nuits séoulites s’égayent de mini-bus qui transportent enfants et adolescents à leurs cours privés.
Plus de jobs que de travail
Pourtant cet investissement important dans le système éducatif est loin d’être une garantie de trouver automatiquement l’emploi désiré, même si a priori le taux de chômage « officiel » peut le laisser penser : 35% de la population active ne cotisent pas à un système de chômage, soit parce que l’entreprise a moins de trois salariés, soit parce que le travail est un job (moins de 80 heures par mois). Sans couverture social, le job est de mise pour survivre et les jobs sont nombreux en Corée. On repère ces gisements de salariés low cost ainsi dans toute la société séoulite : des étudiants, main- d’œuvre corvéable à 4€ de l’heure, recrutés par les chaînes tels que Starbucks, Zoo Coffe ou Cafe Bean ; des retraités, profitant des transports gratuits, qui font office de livreurs pour la multitude de sites internet ; des femmes sous-payées qui représentent l’essentiel des employés de commerce et des supermarchés ouvert 24h/24h ; des cumulards d’emplois, à l’image de ces enseignants qui le soir s’improvisent conducteurs pour ramener les propriétaires de voitures éméchés après avoir passé une soirée entre collègues.
La population invisible des diplômes sans emploi
Si cette population précaire qui ne bénéficie pas de la couverture d’une assurance- chômage est clairement identifiée, il en est une autre en revanche qui échappe à toutes statistiques sur le chômage : les diplômés sans emploi. Plus du tiers des 25-64 ans sont déclarés sans activité, dont la majorité est diplômée. Les chiffres publiés par l’OCDE à la mi-septembre sont venus confirmer la situation de crise à laquelle doit faire face le gouvernement de Lee Myun-bak, car au sein de l’organisation internationale, la Corée du Sud est lanterne rouge, précédant tout juste la Turquie, avec un taux d’emploi de seulement 76% pour les diplômés du tertiaire (70% pour les 2e cycle du secondaire et post-secondaire non tertiaire). A titre de comparaison, la France se situe dans la moyenne de l’OCDE avec 84%, la Norvège se réservant la première place de ce classement avec 90%. Alors qu’au recrutement ils sont préférés par les grands groupes et les administrations, les jeunes diplômés sud-coréens mettent en moyenne 11 mois pour trouver un travail.
Petits boulots : diplômés contre non-qualifiés
Entre logique éducative poussée à l’extrême dans l’espoir de décrocher la « bonne situation », et souci d’offrir un service gratuit 24h/24h mais qui multiplie les emplois précaires, les responsables politiques ont bien des difficultés à trouver une solution à un marché de l’emploi complexe, où les mieux diplômés finissent par occuper des postes d’emploi non-qualifiés. Pour l’instant, on court au plus pressé : les 30 plus importantes entreprises de Séoul se sont ainsi engagées à multiplier les embauches, dont une moitié de diplômés pour le deuxième semestre 2011. Mais le gouvernement également insiste auprès des administrations pour qu’elles évitent une discrimination massive à l’embauche pour les non diplômés ; cela reste à ce jour un vœu pieux puisque en juillet dernier, les entreprises du secteur public ont « annoncé qu’elles auront du mal à les embaucher ».
Arnaud Vojinovic pour www.lesinfluences.fr
Mercredi 28 Septembre 2011
http://emploiparlonsnet.fr/les-directs/made-in-seoul
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