Ce qui hier était dit utile l'est encore. Mais ce qui paraissait futile se révèle être maintenant de première nécessité. Alambiquée, la chose? Non pas, quand on aborde les deuxième et troisième cycles des études supérieures, le monde des maîtrises et autres doctorats.
Temps de récession peut-être oblige, ou tout simplement résultat des campagnes menées par les ténors de l'économie néolibérale? Toujours est-il que le mot «utilitaire» est de toutes les bouches, et même Guy Breton, le recteur de l'Université de Montréal, s'en est inspiré lors d'un exposé qu'il a prononcé à la suite d'une invitation lancée par le Conseil des relations internationales de Montréal: «Les cerveaux [doivent] correspondre aux besoins des entreprises», déclarait-il donc ce 6 octobre dernier, au Rendez-vous du savoir, avant d'ajouter: «Je suis convaincu que [les universités] peuvent mieux faciliter le travail des entreprises.»
Qu'une telle prise de position soit reçue favorablement par certains mem-bres de sa communauté, cela se conçoit, et il suffit de se rendre à l'École de technologie supérieure pour entendre un Hany Moustapha, directeur du programme de génie aérospatial, reprendre un discours de même nature: «Les contacts entre l'industrie et l'université, c'est une chose très importante. Et, au Québec, on est très fort là-dedans. On a eu au moins trois consortiums de recherche pour promouvoir et solidifier les collaborations entre les industries et les universités.»
Et ce dernier n'était-il point arrivé à ce poste avec en tête un programme fort clair: «Ma vision était d'intégrer les disciplines pour mieux répondre aux besoins de l'industrie. Dans la plupart des universités, les départements travaillent en silo, mais l'aérospatiale, c'est une application transversale, qui regroupe le génie mécanique, le génie technique, le génie logiciel, etc. Alors, mon rôle, c'est de promouvoir, de consolider et puis d'intégrer.»
Tendance
Et dans sa propre université, comme dans les autres établissements, le discours du recteur semble par les actes confirmé. Sommes-nous en géographie que Claude Comtois, le conseiller pédagogique du département, se félicite des résultats d'embauche de ses doctorants à la conclusion de leur parcours universitaire: il est de 100 %. «Nous avons une niche de marché. Tout ce qui touche au développement durable et à l'environnement est très en demande. La géographie est un domaine en croissance.»
Et ailleurs, on en arrive même à concevoir des programmes dont le projet est de venir en appui aux entreprises, de favoriser leur fonctionnement et d'assurer leur développement. À Sherbrooke a ainsi été mise en place une maîtrise en stratégie de l'intelligence d'affaires. Et le succès est bien là, comme nous en informe Manon G. Guillemette, qui est responsable de ce programme: «Il y a présentement un vif intérêt pour la stratégie de l'intelligence d'affaires, en particulier dans les grandes entreprises, comme les établissements financiers, les entreprises de commerce de détail et les manufacturiers. D'ailleurs, tous mes étudiants à la maîtrise trouvent un emploi trois mois après avoir reçu leur diplôme.»
Ainsi, il est facile de comprendre que le diplôme de deuxième cycle en développement économique communautaire de l'Université Concordia a été, au fil des ans, orienté pour faire en sorte que l'économie sociale, et son entrepreneuriat, prenne de plus en plus de place dans le contenu élaboré pour la formation: cet «autre modèle» économique n'est-il point en train de s'imposer et les tenants de l'économie solidaire ne déclarent-ils point que le Québec a été une région moins touchée que d'autres par la récession, du fait de cette économie jusque-là parallèle?
Ésotérique?
En fait, dans ce dernier cas, on constate que ce qui n'était point acceptable au temps où les MBA étaient au service des banques et autres machines financières, toutes celles qui sont les responsables du choc de 2008 au temps où le mot «profit» était de tous les discours économiques, ce qui était de «gauche» apparaît même maintenant utile. Et, aujourd'hui, il en va encore de même quand le «printemps arabe» remet à l'avant-scène les recherches «ésotériques» de ceux et celles qui en sciences humaines s'appliquaient, et s'appliquent encore, à comprendre ces sociétés dont les discours fondateurs se situent à l'extérieur du spectre occidental. Et ce, avec pour résultat de contrer le manichéisme grossier des ténors d'une politique américaine à la Cheney et Bush.
Urgence
L'université doit établir ses priorités. Doit-elle céder à l'urgence et se faire ainsi belle pour qui la finance, les gouvernements en tête, ceux-là mêmes qui sont mis en place par un électorat qui adopte les thèses avancées par les multiples think-tanks de la droite? Ou, au contraire, doit-elle se maintenir dans la voie tracée autrefois par un humanisme qui donnait plus d'importance au savoir comme tel qu'à l'accumulation de données et à leur traitement «utile»?
Pour le savoir, il suffira d'être à l'affût des divers palmarès qui afficheront les futurs programmes d'études supérieures qui prennent place, et alors on saura vers où, et comment, se dirigent l'université québécoise et ses divers établissements.
Dans cet ordre d'idées, le futur doctorat en sexologie de l'Université du Québec à Montréal qui serait mis en place en 2012, s'il reçoit l'aval de la ministre de l'Éducation, serait-il annonciateur d'une tendance?
Temps de récession peut-être oblige, ou tout simplement résultat des campagnes menées par les ténors de l'économie néolibérale? Toujours est-il que le mot «utilitaire» est de toutes les bouches, et même Guy Breton, le recteur de l'Université de Montréal, s'en est inspiré lors d'un exposé qu'il a prononcé à la suite d'une invitation lancée par le Conseil des relations internationales de Montréal: «Les cerveaux [doivent] correspondre aux besoins des entreprises», déclarait-il donc ce 6 octobre dernier, au Rendez-vous du savoir, avant d'ajouter: «Je suis convaincu que [les universités] peuvent mieux faciliter le travail des entreprises.»
Qu'une telle prise de position soit reçue favorablement par certains mem-bres de sa communauté, cela se conçoit, et il suffit de se rendre à l'École de technologie supérieure pour entendre un Hany Moustapha, directeur du programme de génie aérospatial, reprendre un discours de même nature: «Les contacts entre l'industrie et l'université, c'est une chose très importante. Et, au Québec, on est très fort là-dedans. On a eu au moins trois consortiums de recherche pour promouvoir et solidifier les collaborations entre les industries et les universités.»
Et ce dernier n'était-il point arrivé à ce poste avec en tête un programme fort clair: «Ma vision était d'intégrer les disciplines pour mieux répondre aux besoins de l'industrie. Dans la plupart des universités, les départements travaillent en silo, mais l'aérospatiale, c'est une application transversale, qui regroupe le génie mécanique, le génie technique, le génie logiciel, etc. Alors, mon rôle, c'est de promouvoir, de consolider et puis d'intégrer.»
Tendance
Et dans sa propre université, comme dans les autres établissements, le discours du recteur semble par les actes confirmé. Sommes-nous en géographie que Claude Comtois, le conseiller pédagogique du département, se félicite des résultats d'embauche de ses doctorants à la conclusion de leur parcours universitaire: il est de 100 %. «Nous avons une niche de marché. Tout ce qui touche au développement durable et à l'environnement est très en demande. La géographie est un domaine en croissance.»
Et ailleurs, on en arrive même à concevoir des programmes dont le projet est de venir en appui aux entreprises, de favoriser leur fonctionnement et d'assurer leur développement. À Sherbrooke a ainsi été mise en place une maîtrise en stratégie de l'intelligence d'affaires. Et le succès est bien là, comme nous en informe Manon G. Guillemette, qui est responsable de ce programme: «Il y a présentement un vif intérêt pour la stratégie de l'intelligence d'affaires, en particulier dans les grandes entreprises, comme les établissements financiers, les entreprises de commerce de détail et les manufacturiers. D'ailleurs, tous mes étudiants à la maîtrise trouvent un emploi trois mois après avoir reçu leur diplôme.»
Ainsi, il est facile de comprendre que le diplôme de deuxième cycle en développement économique communautaire de l'Université Concordia a été, au fil des ans, orienté pour faire en sorte que l'économie sociale, et son entrepreneuriat, prenne de plus en plus de place dans le contenu élaboré pour la formation: cet «autre modèle» économique n'est-il point en train de s'imposer et les tenants de l'économie solidaire ne déclarent-ils point que le Québec a été une région moins touchée que d'autres par la récession, du fait de cette économie jusque-là parallèle?
Ésotérique?
En fait, dans ce dernier cas, on constate que ce qui n'était point acceptable au temps où les MBA étaient au service des banques et autres machines financières, toutes celles qui sont les responsables du choc de 2008 au temps où le mot «profit» était de tous les discours économiques, ce qui était de «gauche» apparaît même maintenant utile. Et, aujourd'hui, il en va encore de même quand le «printemps arabe» remet à l'avant-scène les recherches «ésotériques» de ceux et celles qui en sciences humaines s'appliquaient, et s'appliquent encore, à comprendre ces sociétés dont les discours fondateurs se situent à l'extérieur du spectre occidental. Et ce, avec pour résultat de contrer le manichéisme grossier des ténors d'une politique américaine à la Cheney et Bush.
Urgence
L'université doit établir ses priorités. Doit-elle céder à l'urgence et se faire ainsi belle pour qui la finance, les gouvernements en tête, ceux-là mêmes qui sont mis en place par un électorat qui adopte les thèses avancées par les multiples think-tanks de la droite? Ou, au contraire, doit-elle se maintenir dans la voie tracée autrefois par un humanisme qui donnait plus d'importance au savoir comme tel qu'à l'accumulation de données et à leur traitement «utile»?
Pour le savoir, il suffira d'être à l'affût des divers palmarès qui afficheront les futurs programmes d'études supérieures qui prennent place, et alors on saura vers où, et comment, se dirigent l'université québécoise et ses divers établissements.
Dans cet ordre d'idées, le futur doctorat en sexologie de l'Université du Québec à Montréal qui serait mis en place en 2012, s'il reçoit l'aval de la ministre de l'Éducation, serait-il annonciateur d'une tendance?
29 octobre 2011